Ces armes, bien que remontant sous cette forme au XVIIIe siècle, présentent d’une certaine manière toutes les caractéristiques d’un logo moderne. En effet, celles-ci sont la version simplifiée au lambel et à une seule fleur de lys des armes des Ducs d’Anjou capétiens, qui à partir de Charles Ier, un autre frère de Saint Louis, deviennent Comtes de Provence en 1245 (1). Par la suite, cette accession permettra en 1481 à Louis XI, grâce il est vrai à une argutie juridique relevant plus de la manœuvre que du simple exercice d’un droit légitime de proclamer le rattachement de la Provence à la France.
Sous cette forme simplifiée, et c’est ici que le caractère avant-gardiste du dessin énoncé plus tôt prend tout son intérêt, elles figuraient déjà dans les armes du jeune Comte de Provence, petit-fils de Louis XV, et futur Roi Louis XVIII.
A côté de ces armes, qui de notre point de vue sont les véritables armes de Provence, de secondes sont depuis une trentaine d’années fortement mises en avant. Si les motivations politiques de ce mouvement sont évidentes et peuvent bien sur en tant que telles être discutées, il nous appartient tout de même, sans entrer dans cette polémique, de les présenter et surtout d’en expliquer l’origine. Le blasonnement de ces "autres" armes de Provence est : d’or, à quatre pals de gueules.
Il s’agit de celles que portaient les Rois d’Aragon, sortis des Comtes de Barcelone, qui de 1112 à 1245 régnèrent également sur la Provence.
Ces armoiries, qui de nos jours sont toujours celles du Royaume d’Aragon et figurent en tant que telles dans les armes du Royaume d’Espagne, sont intimement associées à une époque antérieure au rattachement de la Provence non seulement à la France, mais aussi même à la dynastie capétienne. Pour autant, faut-il les considérer comme étant nécessairement associées à la dynastie catalane ? Rien n’est moins sur !
En effet, nous devons ici exposer une énigme héraldique, qui disons le tout de suite n’a pas à ce jour de réponse certaine. A l’origine de cette énigme, nous trouvons les armoiries du Comté de Gévaudan, correspondant peu ou prou à l’actuel département de la Lozère, dont le blasonnement est lui aussi "d’or, à quatre pals de gueules". Suite à son mariage avec Gerberge, héritière du Comté de Provence, Gilbert, Vicomte de Millau et Comte de Gévaudan, permet à sa fille Douce de Gévaudan de devenir Comtesse de Provence. Comme, à son tour, Douce épouse en 1112, le Comte Raymond Bérenger Ier de Barcelone, apportant ainsi le Comté de Provence à la dynastie catalane, il est permis de penser qu’à cette même occasion, les Comtes de Barcelone aient également trouvé les armes aux quatre pals dans la corbeille de mariage. Seulement voila, la chose n’est pas aussi simple, car par cette union, Douce n’apporta pas seulement le Comté de Provence, mais aussi le Comté de Gévaudan. Hors, comme nous ne disposons pas d’informations héraldiques indiscutables de cette époque (2), qui permettraient de savoir précisément à partir de quand tant les Comtes de Gévaudan que les Comtes de Barcelone ont adopté les armes aux quatre pals, rien ne nous dit qu’en réalité les Comtes de Barcelone n’ont pas à l’occasion de cette union apporté leurs armoiries à la fois au Gévaudan et à la Provence… Bref, sans éléments de preuve définitifs, nous en restons au problème de l’œuf et de la poule, que nous ne prétendrons pas trancher ici.
(1) Les Ducs d’Anjou et Rois de Naples, portaient « d’azur, semé de fleurs de lys d’or, au lambel de gueules ». Ces armes furent par la suite combinées à d’autres, notamment celles du Royaume de Jérusalem, mais ceci est une autre histoire.
(2) A notre connaissance, les seules informations existantes sur l’héraldique des Comtes de Gévaudan antérieurs à 1112 sont apocryphes. Ainsi, les explications données par exemple par le Vicomte de Lescure dans son Armorial du Gévaudan, 1929, p.9, ne reposent que sur des conjectures.
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